Djibouti /Culture"Fleur du Désert" présenté en avant-première africaine à Djibouti

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L'actrice et mannequin éthiopienne Liya Kedebe, le 4 mars 2010 à Paris pour présenter le film "Fleur du désert".
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DJIBOUTI Dans les rocailles ocres et noires de Djibouti, une petite fille aide une chèvre à mettre bas: c'est la première scène de "Fleur du Désert", présenté samedi soir en avant première africaine à Djibouti où le film a été en partie tourné.

"Nous avions promis de revenir présenter le film dès qu'il serait terminé, la promesse a été tenue par le producteur Peter Hermann, et la réalisatrice Sherry Hormann", explique Sylvia Montalte, responsable de la production.

"Fleur du désert" est tiré du livre éponyme de Waris Dirié, top model somalienne qui raconte son parcours étonnant des plaines somaliennes aux podiums des plus grandes capitales de la mode.

Mais surtout, ce best seller autobiographique constitue un émouvant plaidoyer contre l'excision, pratique très répandue dans la Corne de l'Afrique et notamment à Djibouti.

"Il y avait dès le début une volonté de la réalisatrice et du producteur, de faire de ce film, comme du livre de Waris, un outil de sensibilisation contre l'excision", précise Mme Montalte.

Le film - sorti le mois dernier en Europe - va être projeté à plusieurs reprises à Djibouti, à l'Institut français Arthur Rimbaud, mais aussi dans les régions reculées du pays qui ont servi de décors au film.

La première dans la capitale a rassemblé plus de 200 personnes, dont une majorité de femmes et de jeunes filles, parfois gênées, parfois très émues par une réalité quotidienne présentée crûment dans le film.

"Ce film donne un message important qui change les vies. L'excision c'est à abolir, c'est dégoûtant", confie Suraya Mohamed, 14 ans, qui joue Waris Dirié adolescente dans le film.

"Autour de nous on n'en parle pas, c'est un sujet délicat. On ne sait pas qui est coupée. Le film ne va pas arrêter l'excision, mais au moins réduire la pratique", espère timidement l'adolescente.

Pour Mme Degmo Mohamed Issack, parlementaire de la majorité présidentielle, secrétaire générale de l'Union nationale des femmes djiboutiennes (UNFD) qui lutte contre l'excision, et vice-présidente de la Commission nationale des droits de l'Homme, "le problème c'est d'appliquer la loi".

"Djibouti s'est doté dès 1994 d'une loi qui interdit l'excision (...) mais qui n'a jamais été appliquée (...) parce qu'avant une enfant était trop petite légalement pour témoigner. En 2009, j'ai repris le texte qui est passé devant le parlement (...). Aujourd'hui, la victime, ou une association ou toute autre personne peut porter plainte", explique-t-elle.

Pourtant la pratique met du temps à diminuer et les chiffres officiels sont peu fiables. La ministre de la Jeunesse et des Sports, Hasna Barkad Daoud, affirme que "de nombreuses actions ont été menées à bien, les résultats sont là: 55% des filles âgées de 7 à 12 ans n'ont pas été excisées".

Mais pour Mme Issack, "il n'y a pas de chiffre fiable. Cette étude a été menée dans les écoles sur un trop petit échantillon. En milieu urbain ça a reculé, mais pas en milieu rural. (...) Ceux qui considèrent la lutte contre l'excision comme une urgence ne sont pas nombreux".

Selon l'Unicef, 93% des femmes (15-49 ans) djiboutiennes ont été mutilées, et 49% des filles en 2007.

La scène choc du film présente l'excision de Waris Dirié, jouée par la petite Safa Idriss Nour, 5 ans, l'âge normal de la cérémonie à Djibouti.

"Nous allons prendre en charge la scolarité de cette petite grâce à la production et aux fondations de Liya Kebede (actrice éthiopienne qui tient le rôle titre) et de Waris Dirié", assure Mme Montalte.

"C'est une goutte d'eau dans la mer. Mais on espère qu'elle reprendra le flambeau quand elle sera plus grande comme l'a fait Waris, et qu'elle aura le droit d'être une femme".

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